Casablanca accueillera les 1er et 2 mars la première édition de FUTUR.E.S in Africa, grand rassemblement d’acteurs des écosystèmes français, marocain et plus largement africain de l’innovation. Dans ce cadre-là, des entreprises hexagonales – et notamment de nombreuses start-up – vont échanger pour la première fois avec les acteurs majeurs du numérique africain, qu’ils soient institutionnels, penseurs, ou entrepreneurs. Pour en savoir plus, nous avons demandé à Odin Demassieux, International Development Manager chez Cap Digital, de nous expliquer en quoi ce continent en plein boom constitue une opportunité en or pour les entreprises françaises.
Pourquoi les start-up et PME françaises devraient-elles se positionner en Afrique alors même qu’elles tentent de pérenniser leur présence en France ?
Odin Demassieux : L’Afrique est aujourd’hui considérée comme le continent « sexy » – tout le monde veut y être et personne ne souhaite laisser partir le train. L’Afrique, c’est un marché énorme mais complexe à aborder. C’est là l’intérêt d’un événement comme FUTUR.E.S in Africa, qui permet de réunir les différents acteurs, les différentes parties prenantes, permettant aux entreprises de se connecter aux « bonnes personnes » sur place.
Finalement, l’objectif est de se frayer un chemin dans ce marché-là, de mieux le comprendre, de mieux y accéder – d’y accéder avec les bons partenaires, la bonne approche. C’est tout le rôle de Cap Digital : connecter les écosystèmes afin de favoriser le bon développement des entreprises. D’une manière globale, nous sommes persuadés que nos entreprises ont beaucoup à apprendre du continent africain, ne serait-ce que pour anticiper des usages à venir en Europe.
On dit souvent que l’un des problèmes de l’écosystème de l’innovation marocain est d’avoir du mal à connecter les start-up et PME aux grands groupes. Quel est votre regard là-dessus ?
Dans de nombreux pays, le terme « start-up » est avant tout péjoratif – avec l’image d’une entreprise qui propose des fourchettes connectées et n’a aucun impact sociétal. C’est cette image qui prédomine au Brésil, par exemple, et dans de nombreux autres marchés émergents. En France, si toutes les entreprises ne s’identifient pas à la start-up, on a assimilé très différemment ce terme, en ayant en tête une entreprise en croissance – voire en hypercroissance –, très forte technologiquement, avec un gros impact.
La différence réside dans la perception, mais pas que. En Afrique, l’innovation est bien souvent portée par les grands groupes, très structurés. Mais tout ça est en train de bouger. Au Maroc, tout un écosystème, toute une structure nouvelle émerge, via des incubateurs notamment. Mais il est vrai que le lien entre start-up/PME et grands groupes n’est pas encore « naturel ». Logiquement, c’est à un acteur comme Cap Digital de créer ce lien ; c’est au tiers de confiance d’articuler, d’organiser la compréhension entre les acteurs, la visibilité des entreprises innovantes. Ces dernières sont encore souvent mal considérées, alors qu’elles peuvent contribuer au développement des grands groupes, mais aussi des territoires et des institutions.
Sur le continent africain, les thématiques économiques s’accompagnent souvent d’impératifs de développement. Comment articuler ces deux notions, et comment éviter d’être accusé de « néocolonialisme » économique, une question souvent brûlante en France ?
À l’origine de FUTUR.E.S in Africa il y a, entre autres raisons, la volonté de la région Casablanca-Settat de devenir la première « smart région » d’Afrique. En tant qu’institution, ils ont envie de porter l’innovation et de la rendre accessible aux citoyens. Cette prise de conscience est palpable chez de nombreux acteurs institutionnels africains : tous ont la conviction que le numérique peut être mis au service de la société, et il en va de même pour nous, chez Cap Digital. Nous faisons tout pour ne jamais perdre de vue l’importance des questions sociétales en lien avec le numérique.
Nous Français, Européens, nous ne venons pas en tant que grands « sachants » – notre positionnement est plus humble, nous sommes des contributeurs. Nous venons stimuler un écosystème naissant, voilà tout. Il est vrai que nombre d’entreprises françaises sont à côté de la plaque en ce qui concerne les usages africains. Ces usages-là sont en revanche parfaitement maîtrisés par les entreprises locales. Du coup, il y a une transmission de savoirs, transmission qui est inhérente à l’ambition de Cap Digital.
De manière parallèle, notre présence au Maroc permettra sans doute d’inspirer certains acteurs locaux, de leur donner envie de faire – c’est l’un des objectifs de FUTUR.E.S : inspirer les citoyens, inspirer les jeunes, inspirer les entrepreneurs et entrepreneuses.